
Hoka : le petit poucet défie Goliath
La marque de chaussures de running a vu le jour en 2009 à Annecy.
La marque de chaussures de running a vu le jour en 2009 à Annecy. Cinq ans plus tard, elle va réaliser environ 35 M€ de chiffre d’affaires et commence à s’imposer sur le marché mondial. Entretien avec Jean-Luc Diard, son cofondateur, ancien PDG du groupe Salomon.
Comment est née Hoka ?
Nous pratiquions le raid aventure avec Nicolas Mermoud (3e de l’UTMB, Ultra Trail du Mont-Blanc 2007) et Christophe Aubonnet. En course à pied, nous n’allions pas aussi vite que nous voulions et les descentes étaient toujours un calvaire. Au-delà de ces sensations, nous constations que les traumatismes étaient nombreux dans le domaine du running. Il y avait quelque chose à inventer… En quittant Salomon, en 2008, je me suis dit qu’il y avait là une belle opportunité à exploiter, et, pourquoi pas, une aventure entrepreneuriale nouvelle à initier. Nous avons débuté à cinq, avec un designer externe. Tous polyvalents, avec une bonne connaissance multisports. Tous anciens de Salomon.
Vous avez alors imaginé une chaussure surprenante, à semelle épaisse, qui ne ressemble à aucune autre sur le marché ?
Le pneu d’un vélo de route n’a rien à voir avec celui d’un VTT… Nous sommes partis dans la conception d’une semelle épaisse et courbe permettant un parfait déroulé du pied, un amorti bien supérieur par rapport aux standards habituels , mais conservant une grande légèreté. D’entrée, les essais ont été concluants. Les sensations étaient réellement différentes et la progression plus rapide. Nous avons présenté notre premier modèle sur le salon de l’UTMB en 2009 à Chamonix et spontanément, des traileurs ont voulu courir avec nos prototypes. On s’est dit qu’il fallait commercialement accélérer les choses pour ne pas se faire doubler. Le running est un marché très important, qui compte les plus grosses entreprises du monde. Notre premier modèle, la Mafate, a été lancé en février 2010.
Cinq ans plus tard, qu’avez-vous le sentiment d’avoir apporté au marché du running ?
Nous avons voulu apporter une approche originale mais logique. L’idée : se faire plaisir en courant, tout en apportant protection et performance. Les utilisateurs reconnaissent courir plus longtemps, à la même vitesse, avec une réduction des traumatismes musculaires ou articulaires. Nos chaussures sont polyvalentes, utilisables sur un très grand nombre de terrains, du petit footing au marathon aux ultra-trails les plus difficiles. Nous continuons à développer notre offre : nous allons lancer, cet été, un modèle spécial marathon puis en fin d’année, une chaussure d’athlétisme et en 2015, une gamme multifonctions.
Vous avez choisi de miser sur les Etats-Unis. Pourquoi ?
Les Etats-Unis concentrent 40 % du marché mondial du running. C’est non seulement le plus gros marché mais aussi le seul où une innovation peut se développer rapidement en influençant le reste du monde. Le concept Hoka a fait tilt. Résultat : la marque réalise actuellement les 2/3 de ses ventes dans ce pays
Nous avons parallèlement cherché des appuis bancaires pour nous développer. Sans succès. Nous sommes alors partis en quête de partenaires financiers mais pas seulement : nous voulions aussi initier des synergies susceptibles d’accélérer notre développement. L’Américain Deckers Outdoor Corporation, propriétaire de la célèbre marque Ugg, est ainsi entré au capital en 2012. Le patron de ce groupe est un excellent coureur. Il souhaitait se diversifier. En 2013, sur la base du succès de Hoka aux USA, nous avons souhaité passer à une autre étape : Deckers possède aujourd’hui la marque.
Nous sommes à présent dix personnes à Annecy. Nous serons 15 personnes d’ici à la fin de l’année. 50 % du développement produits continue de se faire à Annecy-le-Vieux et nous assurons la commercialisation Europe. Nous restons les défricheurs ! Nous avons ainsi instauré un rapport gagnant/gagnant avec Deckers.
Un dernier mot… Vous avez baptisé la marque Hoka, pourquoi ?
Hoka signifie « voler » en maori et notre symbole est un oiseau.
Propos recueillis par Hélène VERMARE